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Levaisseaudor

Ecrire, marcher pour laisser une trace. Correspondances imaginaires entre des êtres improbables. l'art "appliqué" de la rencontre. Actualité culturelle pas forcément actuelle. carnets (extraits) poético-philosophiques Impressions de voyage à mille lieues ou ici même.

enivrez-vous

 

"Jamais vous ne saurez jamais si ce n'était qu'un jeu ou si moi je vous aimais"

Claude Léveillée (le rendez-vous)

 

De toutes façons elle n'existait  plus depuis cette nuit terrible sur ce quai de gare. Elle se demandait même si elle avait existé, si toutes ces lettres échangées d'un bout à l'autre de la terre, avaient été autre chose que de simples envolées virtuelles de virtuoses subitement évanouis... 

 

Pour le retrouver un jour, un seul impératif immédiat : survivre, refuser un nouveau voyage, rester debout.

Dès lors le courage n'était plus de se donner la mort, c'était de rester en vie.

 

Où était-il? mort peut-être, prisonnier quelque part, l'otage d'antique tortionnaire, sous l'emprise de drogues, errant  sur une route sans mémoire. Cela pouvait faire sourire, mais la disparition soudaine d'un être cher est impensable, inimaginable. Il est impossible de faire le deuil "comme on dit" de quelqu'un qui n'est pas mort, dont on ne peut toucher le corps désormais froid.

Les souvenirs n'ont eu de cesse depuis de cogner sa mémoire de femme fantôme, des bleus incessants marquaient sa peau, elle se cognait partout à tout, des coups de couteaux pour un parfum, une image, un rire d'enfant, une poignée de main, un poème, un arbre naissant, la caresse du vent sur la nuque, un plat chatoyant, un déjeuner sur l'herbe, l'odeur de la craie et un bord de rivière.

Il est difficile de vivre un jour de plus lorsqu'on a si bien vécu...et que l'on sait que désormais rien ne saura atteindre ce degré d'exaltation commun pour chaque minuscule chose de la terre, . Ensemble, ils avaient appris à voir autrement, elle continuait  à voir avec ses yeux qui n'étaient plus. Peut être même qu'elle s'imaginait continuer à voir alors que la cécité l'avait gagnée. Mais les images restaient tellement vivantes, si présentes et si vibrantes qu'elle pouvait les toucher encore.. 

 

Les arbres : il les avait précautionneusement prélevé dans les jeunes bois autour de la petite école où elle  exerçait, nichée au creux d'un vallon. La classe était unique, son fonctionnement identique ou presque à celui d'une grande maison familiale avec ses règles, ses grandes fêtes, ses batailles, ses danses et ses rires. L'hiver, il n'était pas rare que les chutes de neige empêchent  le transport des petits écoliers. L'institutrice dev ait se résoudre à faire la classe à 3 ou 4 gamins venus à pied très fiers jusqu'au gros perron.gris. 

Chaque midi, de délicieuses odeurs de plat mijoté, de tarte aux fruits ou de gâteau moelleux s'immisçaient dans la salle de classe, aiguisant l'appétit des petits élèves occupés à des ateliers. Lorsque Rose, la cuisinière animait la clochette de la petite cantine de campagne, tous se précipitaient comme de jeunes chiots devant la porte d'entrée de la salle à manger aux murs recouverts de boiseries et de productions d'enfants. Après le lavage obligatoire et méthodique des mains sous le contrôle bienveillant de Rde l'assistante maternelle, tout ce petit monde attendait le signal ultime : celui d'entrer dans le palais des délices!

Les beaux jours, R rejoignait S pour des pique-niques improvisés sous les hêtres verdoyants ou dans l'herbe de la prairie. Ils déjeunaient sommairement de fruits et de baisers. Ensuite, ils s'étendaient au soleil , mâchonnant un brin d'herbe et ils s'aimaient., et ils s'aimaient.

Leur bonheur était fait de toutes petites choses, très simples. Cet amour...

Cet amour
Si violent
Si fragile
Si tendre
Si désespéré
Cet amour
Beau comme le jour
Et mauvais comme le temps
Quand le temps est mauvais
Cet amour si vrai
Cet amour si beau
Si heureux
Si joyeux
Et si dérisoire
Tremblant de peur comme un enfant dans le noir
Et si sûr de lui
Comme un homme tranquille au millieu de la nuit
Cet amour qu faisait peur aux autres
Qui les faisait parler
Qui les faisait blêmir

Jacques Prévert

 

Cet amour  était une bulle de savon dans l'air pur, légère, pleine de couleurs, s'élevant, insouciante toujours plus haut.

Il a fallu que certains s'acharnent à la crever

link.

 

http://youtu.be/3aIW0sWUpZs

 

 

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